18 décembre 2018

10 ans du Prix LNE de la recherche : deux chercheurs en métrologie électrique récompensés

A l’occasion des 10 ans de son Prix de la recherche, le LNE récompense cette année les travaux majeurs de Wilfrid Poirier et Félicien Schopfer en métrologie électrique.

En novembre dernier la 26ème Conférence générale des poids et mesures a voté la redéfinition du Système international d’unités. Cette redéfinition a notamment été basée sur la mécanique quantique avec la fixation de la constante de Planck h et de la charge élémentaire e qui redéfinissent respectivement le kilogramme et l’ampère. Les étalons à effet Hall quantique et à effet Josephson, reliés à ces constantes, permettent désormais de réaliser les unités électriques et même le kilogramme avec un excellent niveau d’exactitude.

Le LNE a joué un rôle capital dans cette redéfinition du Système international notamment grâce aux travaux des chercheurs récompensés cette année par le Prix LNE de la recherche : Wilfrid Poirier & Félicien Schopfer.

Ces derniers ont travaillé à l’application de l’effet Hall quantique en métrologie fondamentale avec des résultats marquants, qui vont de tests d’universalité records, au développement d’un générateur programmable de courant qui permettra la mise en œuvre de l’ampère avec une exactitude inégalée, en passant par le développement d’un étalon quantique de résistance en graphène fonctionnant dans des conditions expérimentales simplifiées sans précédent.

Les 10 ans du Prix LNE de la recherche

Créé en 2009, le prix LNE de la recherche a tour à tour récompensé des chercheurs sur des thématiques et des sujets aussi variés que les nanotechnologies, la santé, l'environnement, les télécommunications, l'énergie, le transport les technologies de l’information, ou encore les matériaux. En 10 ans, le LNE a récompensé plus d’une quinzaine de chercheurs ayant tous su allier science et pragmatisme, pour des travaux de recherche ayant un impact fort que ce soit pour la science, l’industrie et la société.

Les lauréats

Wilfrid Poirier

PoirierAncien élève de l’Ecole supérieure de Physique et de Chimie Industrielles de Paris, Wilfrid Poirier effectue une thèse sur le transport électronique quantique au CEA et reçoit son titre de docteur en physique du solide en 1997. Il intègre le LCIE en 1998, puis le LNE en 2001, en tant que responsable des études portant sur les étalons quantiques de résistance. Depuis, il consacre ses travaux de recherche à la métrologie électrique quantique. Ils ont notamment concerné les tests d’universalité de l’EHQ, le développement de réseaux de Hall et d’un étalon quantique de résistance en graphène. Il s’est également investi dans le développement de l’instrumentation quantique de précision. Plus récemment, il a proposé et développé un générateur quantique de courant réalisant la nouvelle définition de l’ampère. Il a obtenu son Habilitation à Diriger des Recherches de l’université Paris-SUD en 2017.

 

Félicien Schopfer

SchopferIngénieur diplômé de l’École Nationale Supérieure de Physique de Grenoble – Grenoble-INP en 2001, Félicien Schopfer est également titulaire d’un DEA de physique de la matière condensée et docteur en physique de l’Université Joseph Fourier de Grenoble, après une thèse au CNRS sur l’étude expérimentale des propriétés de cohérence quantique des électrons dans des nanostructures métalliques. Il rejoint l’équipe de métrologie électrique quantique du LNE en 2005 pour travailler sur l’effet Hall quantique. Il est d’abord impliqué dans le développement de moyens expérimentaux dédiés et dans des tests d’universalité de l’effet. A partir de 2007, en étroite collaboration avec des partenaires académiques, ses recherches concernent le graphène en vue de simplifier la mise en œuvre de l’étalon de résistance à effet Hall quantique et de favoriser sa dissémination.

L’ampère à l’heure quantique

SI AmpèreAux côtés du kilogramme, du kelvin et de la mole, l’ampère fait partie des quatre unités dont les définitions ont été fondamentalement révisées en novembre dernier. C’est dans le cadre de cette redéfinition qu’un nouveau dispositif offrant un étalon de courant électrique pour la mise en pratique de l’ampère et d’une exactitude inégalée a été développé au LNE grâce notamment aux travaux de Wilfried Poirier et Félicien Schopfer.

Générateur quantiqueDepuis 1948, l’ampère, l’unité de l’intensité du courant électrique, était complexe à mettre en œuvre car définie à partir de la force mécanique entre deux fils infinis séparés d’un mètre dans le vide dans lesquels circule un courant. En pratique, cette définition était impossible à réaliser. Elle avait toutefois été pionnières en la matière puisqu’elle fixait une constante de la nature, la perméabilité du vide. Toutefois cette définition de l’ampère était assez éloignée de ce qu’est fondamentalement un courant, à savoir un flux de charges électriques par unité de temps. D’où l’idée de redéfinir l’ampère à partir de la charge élémentaire, e. En vue de cet objectif, les chercheurs du LNE ont réalisé un étalon matérialisant cette nouvelle définition avec une incertitude relative record de 10-8.

Ce nouveau générateur quantique de courant ouvre la voie à une métrologie électrique complètement fondée, à l’avenir, sur l’ingénierie des étalons quantiques. Avec, par exemple, comme conséquences pratiques la réduction en particulier des incertitudes d’étalonnage réelle pour les mesures de courant. Cette nouvelle définition de l’ampère permet également d’accélérer le développement de technologies quantiques (ordinateur quantique, capteurs aux sensibilités améliorées…).

Pour l’heure, le dispositif est imposant, nécessitant pas moins de trois systèmes cryogéniques pour refroidir, à une température proche du zéro absolu, les étalons quantiques de tension et de résistance ainsi que l’amplificateur. Mais comme l’indique Wilfried Poirier, « Nous avons montré qu’il est possible d’obtenir l’effet Hall quantique dans du graphène sous un champ magnétique plus faible et à une température moins contraignante que dans un échantillon d’arséniure de gallium tel que nous en utilisons actuellement. Ainsi, à terme, un seul cryostat sera nécessaire pour mettre en œuvre notre étalon. » Celui-ci est néanmoins prêt à l’emploi pour la nouvelle définition de l’ampère votée en novembre 2018. Celui-ci offre un premier exemple de combinaison de deux étalons quantiques et réalise la nouvelle définition de l’ampère puisque, via les effets Hall quantique et Josephson, il délivre un courant proportionnel à la charge élémentaire, e.

 

Les 10 ans du Prix LNE de la recherche

TrophéeEn 2009, le LNE et le Comité de la métrologie ont décidé de créer un Prix de la recherche pour distinguer les chercheurs qui contribuent à la réussite et à la notoriété des activités scientifiques du LNE et de l'ensemble des laboratoires du réseau national de la métrologie française.

Le LNE et la métrologie française représentent plus de 200 chercheurs sur des thématiques et des sujets aussi variés que les nanotechnologies, la santé, l'environnement, les télécommunications, l'énergie, le transport (positionnement et navigation entre autres), les technologies de l’information, ou encore les matériaux.

Il était important de créer ce prix pour valoriser l'ensemble des chercheurs du LNE et de la métrologie française, qui depuis de nombreuses années ont contribué à l'évolution de la science et de notre société.

Par ailleurs, dans un monde ou la communication est omniprésente, il est essentiel de faire connaître aux industriels et partenaires économiques et à la société en général, quelles sont les recherches effectuées au sein de nos laboratoires, quels bénéfices peuvent en tirer notre société et pour quelles finalités.

Le prix LNE de la recherche a ainsi tour à tour récompensé, depuis 10 ans, des chercheurs qui ont toujours su allier science et pragmatisme, pour des travaux de recherche ayant un impact fort que ce soit pour la science, l’industrie et la société. Parmi ces travaux, plusieurs se sont notamment révélés majeurs dans le cadre des redéfinitions de l’ampère, du kelvin et du kilogramme.

Les précédents lauréats :

  • 2017 – Jocelyne Guéna, Daniele Rovera & Michel Abgrall (temps-fréquence)
  • 2016 – Philippe Cassette (rayonnements ionisants)
  • 2015 – Laurent Pitre (métrologie thermique)
  • 2014 – Paola Fisicaro (chimie inorganique et électrochimie) & Yves Hermier (métrologie thermique)
  • 2013 – Aimé Ostrowsky (calorimétrie pour les rayonnements ionisants) & Philippe Laurent (étalons de fréquence)
  • 2012 – Jean-Rémy Filtz (photométrie, radiométrie, température et pyrométrie)
  • 2011 – Jacques Perdereau (électroacoustique) & Marie-Martine Bé (radionucléides)
  • 2010 – Gérard Genevès et Patrick Juncar (balance du watt)
  • 2009 – André Clairon (temps-fréquence)

Contacts presse

LNE : Alexandre Papin • 01 40 43 38 92 • alexandre.papin@lne.fr – Valérie Mulot • 01 40 43 40 93